Le Krach boursier de 1847
La crise boursière de 1847 ou la bulle spéculative sur les chemins de fer.
1-Contexte économique et origine du krach boursier de 1847
Comme la plupart des Krachs boursiers, celui de 1847 fut précédé d’une période d’euphorie économique. En effet, l’industrie du chemin de fer français connaît un essor important à partir de 1842. La loi du 11 juin 1842 marqua le lancement de cette expansion. Ce texte législatif prévoit le principe de la demi-concession afin de créer un réseau de chemin de fer à moindre coût : les concessions d’exploitation de chemins de fer sont scindées en tronçons pour éviter la création des trusts. L’industrie ferroviaire commence alors à se développer très rapidement : dès 1845, on répertorie déjà plus de 2000 km concédés et 1700 placés en adjudication. La sidérurgie profite très largement de cette expansion des réseaux avec une croissance autour de 6 % par an entre jusqu’en 1847. Ce phénomène stimule l’intégralité de la croissance française qui augmente de 5.3% en moyenne entre 1842 et 1847.
Cette expansion et cette croissance ne restent pas longtemps invisibles aux banques qui veulent tirer leur épingle du jeu. Les entreprises de chemins de fer et de sidérurgie ont besoin de prêts de long terme pour financer leurs activités. La pression économique de l’investissement massif pousse les structures à se réformer : on passe d’une culture de banques familiales à un nouveau système de crédit. Les « caisses » sont créées (l’une des plus importantes était la Caisse générale du commerce et de l’industrie créée par Jacques Laffitte en 1836). Ce sont des structures à capitaux divisés en action et qui sont gérées non plus par des familles, mais par des conseils d’administration. Les investissements bancaires se réorientent puisque ces nouvelles structures qui investissent notamment dans le chemin de fer pour des investissements de long terme.
Mais comme pour chaque crise économique la phase d’euphorie va rapidement s’emballer et la spéculation prendre le dessus. Les cours des compagnies de chemin de fer augmente de près de 70% entre 1840 et 1847. L’économie perd le contact avec la réalité.
2-Le krach de 1847
L’économie va connaître un point de retournement qui renverse l’équilibre. En France, c’est l’interruption des travaux de la ligne Paris-Lyon qui bouleverse le cycle. La compagnie se voit dans l’obligation de lancer un nouvel emprunt de 100 millions de francs. Ces dépenses de constructions ayant été sous-estimées. De plus, le dividende promis de 7 % passe à 4 %… Les actionnaires commencent à comprendre que tout le secteur a donné des prévisions trop optimistes. S’ensuit mécaniquement une panique bancaire. Ce phénomène est démultiplié par une annonce coïncidente de la remontée des taux d’intérêt de la Banque de France. Ce phénomène est dû à de très mauvaises récoltes en 1845-1846 qui ont obligé de massives importations de denrées alimentaires. La Banque de France cherche à stopper la régression de son encaisse-or et pour se faire augmente son taux d’intérêt à 5 %, ce qui ne fait qu’augmenter la panique financière. Les actionnaires revendent massivement leurs titres. Les cours des actions des compagnies ferroviaires subissent une baisse brutale qui dépasse, pour la plupart des titres, 50% et parfois même 75 % par rapport à leurs cours de 1846. On peut citer ici l’exemple du cours de la Compagnie des chemins de fer du Nord créée en 1845 par James de Rothschild. Son prix d’émission était de 500 francs, il atteint 757 francs en 1846 pour tomber en dessous des 300 francs au début de 1848.
Face à cette situation, le problème devient rapidement le manque d’investissement dans le secteur ferroviaire qui ne peut alors plus poursuivre ses activités. L’effet en chaîne ne se fait pas attendre, impactant directement les industries minières et métallurgiques. Les productions de rail chutent dramatiquement de 54 %, la fonte de 20 % et la houille de 25 % à cause du manque de demande.
Le krach de 1847 présente donc le même modèle que la plupart des krachs du XXe siècle : un essor industriel suivi de près par les banques qui cherchent à en tirer des bénéfices. La machine financière finit par s’emballer perdant tout contact avec la réalité, en particulier avec la valeur réelle des investissements. La révision à la baisse des anticipations entraîne une panique bancaire qui impacte ensuite l’économie réelle.
3-Les conséquences de la crise de 1847
Le premier effet de cette crise fut évidemment la faillite des entreprises et des banques les plus fragilisées. En 1848 la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans, la Compagnie de chemin de fer de Bordeaux à la Teste ou encore la Compagnie des chemins de fer de Marseille à Avignon sont mises sous séquestres par l’état. Dans un premier temps, la construction ferroviaire se trouve extrêmement ralentie. Si elle se poursuit entre 1848 et 1849, c’est à un rythme très lent.
Mais la crise de 1847 a ceci de particulier que c’est une crise qui conjugue un double choc : boursier et de crédit, que les banques françaises faiblement capitalisées ne sont pas en mesure de supporter. Le contexte politique n’aide pas à une stabilisation rapide de l’économie. L’incertitude qui règne face à la monarchie de juillet conjuguée à la baisse du pouvoir d’achat et au chômage entraîne des retraits massifs des dépôts des ménages dans les banques. Ce phénomène ne fait qu’aggraver la crise. En 1848, le retrait des dépôts s’accentue (-10% en 1847) fortement pour connaitre une baisse plus de 80%. La France fait alors face à l’une des plus grandes récessions de son histoire avec un recul de la croissance de près de 22 points. Le système bancaire est complètement désorganisé par les faillites en chaîne des petites institutions et par le retrait soudain des capitaux.
FB pour © FB BOURSE.COM
Source :
Cycle de Minsky et Crises Financières au 19e siècle
La Compagnie des chemins de fer du Nord
Analyse économique et historique des sociétés contemporaines
Suivant la même structure narrative que l’article consacré à la crise de 1837, ce texte synthétise parfaitement les enjeux et les raisons du déclenchement de la crise de 1847. La lecture consécutive des articles consacrés aux deux crises permettent de mieux les comparer et les comprendre.